La CMA renie ses engagements de l’accord d’Alger et reprend les armes : A qui profitera une nouvelle déstabilisation du Mali ?

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La CMA renie ses engagements de l'accord d'Alger et reprend les armes : A qui profitera une nouvelle déstabilisation du Mali ?

Des groupes touaregs signataires en 2015 de l’Accord d’Alger pour la paix et la réconciliation au Mali avec le gouvernement de Bamako ont repris les armes et font des démonstrations en occupant momentanément deux camps, à Gao d’abord et dans le Léré ensuite.

PAR DJILALI B.

Assistons-nous, présentement, à un remake du scénario de 2013 dont le chef d’orchestre était le leader du groupe terroriste Anser Edine, Iyad Ag Ghaly, qui avait ouvert la voie à l’intervention française qui a duré jusqu’en 2023 ?

Tout porte à croire que les groupes rebelles, qui étaient au départ, en 2012, à l’origine de la plongée du Mali dans une crise politico-sécuritaire qui dure jusqu’à aujourd’hui, reviennent avec les mêmes méthodes. Les groupes touaregs réclamaient une autonomie de l’Azawad, puis l’indépendance de cette région du Nord, avant d’être doublés par les groupes terroristes Anser Edine et le Mujao.

En 2013, est annoncée une colonne de 200 véhicules tout-terrain qui a entamé un mouvement pour prendre Bamako. Bamako a sollicité la France qui a rapidement déployé ses forces notamment au nord et au centre du pays. L’opération Serval, nom donné à cette intervention, arrivera à diminuer de l’influence de ces groupes et même à liquider avec l’appui des forces tchadiennes quelques chefs terroristes étrangers. Une mission de l’ONU pour la stabilisation et l’appui au Mali, la Minusma, est installée dans le pays avec un
dispositif de dissuasion non offensif.

Ces dispositifs n’ont cependant pas réussi à éradiquer le terrorisme qui a connu une expansion et une extension de son territoire d’activités. Al Qaïda installe sa succursale malienne en intégrant le groupe d’Ag Ghaly alors que plus récemment apparait le groupe Etat islamique.

Depuis quelques années, on assiste à la détérioration de la situation sécuritaire et l’absence de développement. Plus clairement est établi le bilan maigre de la présence militaire française et étrangère. Les putschistes poussent le bouchon plus loin en évoquant un développement inquiétant des groupes terroristes qui opéraient jusque dans le centre du pays. Constat établi également par l’ONU. Résultat : cet argument a servi d’alibi pour les putschistes pour réclamer le départ des forces françaises et onusiennes par la suite.

Les mêmes groupes touaregs qui étaient à l’origine de l’occupation du Nord en 2012 reviennent aujourd’hui avec un schéma similaire avec des démonstrations de force dont le message est directement adressé aux autorités de transition.

Blocage

Si Bamako est comme le pensent certains observateurs responsable du blocage de la mise en œuvre de l’Accord d’Alger, les groupes rebelles du Nord le sont tout autant, puisqu’ils ont aussi contribué au blocage de la situation en refusant l’application de certains termes de l’accord qu’ils ont paraphé le mois de juin 2015 à Alger.

Ils refusent par exemple de déposer les armes, entre autres facteurs du gel de l’application de l’accord. Si une nouvelle manœuvre de déstabilisation est attendue de venir des groupes terroristes, ce qui ne se justifierait pas par une carence dans le dispositif sécuritaire, l’on ne se doutait pas que la menace vienne des groupes rebelles qui avaient évoqué avec les autorités de Bamako justement du chantier de l’accord.

Ils ont essayé d’empêcher la reprise par les forces armées maliennes des bases (3) que les forces françaises de l’opération Serval ont quittées. Ils vont après placer la barre très haut et faire dans la surenchère en réclamant des négociations avec la junte. Tentent-ils ainsi à travers ces actions – occupation de camps militaires avec accrochages avec les soldats des Fama – à créer un climat d’insécurité identique à celui qui prévalait en 2012 ? Et partant imposer la présence de forces étrangères pour protéger la population et sécuriser le pays.

L’exact scénario exécuté par Iyad Ag Ghaly pour mettre le nord du pays sous le contrôle des forces françaises. Sinon, à quoi joue la CMA (Coordination des mouvements de l’Azawad) en montrant ses muscles au lieu de participer, comme elle s’est engagée
dans l’accord d’Alger, à l’effort militaire pour la lutte contre le terrorisme ? Pour quelle puissance sous-traite la CMA, est-on dans cette circonstance, en droit de s’interroger ?

Parce que l’enjeu n’est certainement pas dans le contrôle des territoires du Nord qui sont déjà contrôlés par les différentes tribus touarègues, il est plus important et son opportunité – rejet de la présence française au Burkina, au Mali, au Niger et probablement d’autres pays prochainement – n’est pas sans arrière-pensées.

Il est suggéré en filigrane le retour de forces étrangères de stabilisation et accessoirement, le non-dit, freiner l’élan des Russes, Chinois ou encore les Turcs pour remplacer économiquement par des partenariats de coopération, la présence militaire étrangère devenue indésirable.

D. B.