Les retraités, ces oubliés de la «bahbouha»

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CNR

/L’Algérie comptait, au 31 décembre 2020, près de 3,4 millions de retraités, dont 1,2 million perçoivent une pension mensuelle inférieure ou égale à 20.000 DA, et 2 millions moins de 30.000 DA/mois. Ce sont, pour la plupart, des salariés qui avaient pris leur retraite professionnelle il y a 15-20 ans, avec les salaires qu’on connaissait à l’époque, et dont les différentes revalorisations n’ont pas mené plus loin que ces seuils de misère.

Pour leur malheur, ils n’ont pu bénéficier de la rente pétrolière des années fastes (ce qu’on appelle communément la «bahbouha») qui a profité à certains privilégiés, et aux retraités des six dernières années, lesquels ont vu leurs salaires revalorisés avant de partir à la retraite. C’est dire qu’avec la cherté de la vie et les hausses continuelles des prix des produits à la consommation, le pouvoir d’achat de nos retraités s’est nettement dégradé ces dernières années, au point d’être relégués à la case des «nécessiteux».  La situation des retraités algériens n’est guère reluisante. Outre leurs «errances» quotidiennes faute d’occupations, distraction ou loisirs qui sont censés occuper les journées de nos seniors, on les voit régulièrement s’aligner devant les commerces pour acheter leur sachet de lait, ou devant les bureaux de poste, à partir de chaque 21 du mois, pour retirer leur maigre retraite. Des pensions de retraites loin de suffire pour boucler un mois complet. Et pourtant, ces «anciens» ont cotisé 32 années et plus pour, au final, ne pas pouvoir jouir d’une retraite sereine. Il est vrai qu’en 2020, le SNMG a été augmenté de 2000 DA et l’IRG supprimé sur les salaires de moins de 30.000 DA, mais cela reste insuffisant par rapport aux différentes inflations que subit le pouvoir d’achat depuis quelques années déjà.

De nombreuses tentatives de redresser la barre ont été amorcées par les différents gouvernements pour redonner un tant soit peu de «dignité» à cette catégorie d’algériens, mais elles ont toujours été en deçà de la réalité. Et ce ne sont ni les différentes revalorisations des pensions de retraite, ni les augmentations annuelles de 1,5 à 2,5% qui auront amélioré le quotidien des presque 3,4 millions de retraités recensés au niveau de la Caisse nationale des retraites (CNR).

Aujourd’hui, le président Tebboune semble accorder une attention particulière à cette frange de la population qui a longtemps souffert des injustices des systèmes mis en place, puisque le dossier devra être traité prochainement par le gouvernement Aïmen Benabderrahmane. Mais pour l’heure, il question de parer au plus urgent : combler le déficit de la CNR.

La CNR atteindra 690 milliards de DA de déficit à la fin de l’année

La Caisse nationale des retraites (CNR) vit, depuis des années, sous le spectre de la faillite. Son déficit s’alourdit d’année en année. De gros déséquilibres ont commencé à apparaître dès 2016 avec les nombreux départs à la retraite anticipée (suspendue depuis). Quand on sait que ce déficit était déjà de 155,1 milliards de dinars en 2014, pour passer à 217 milliards de dinars en 2015, 336,8 milliards de dinars en 2016, 584 milliards de dinars en 2019 et 640 milliards de dinars en 2020, on comprend que le problème n’a jamais été traité dans ses fondamentaux.

Le ministre du Travail a annoncé dernièrement que le déficit de la CNR était de 680 milliards de dinars, il devrait atteindre les 690 milliards de dinars à la fin de l’année 2021. Quand on sait que près de 109 milliards de dinars sont versés mensuellement comme pensions de retraites, on mesure amplement le décalage entre les recettes et les payements de la caisse des retraités. Une augmentation (du déficit) que certains expliquent par la chute des cotisations due au choc pandémique de la Covid-19 et son impact sur les entreprises et l’économie, entre autres.  Pour 2020, la hausse du déficit de la CNR serait liée à la hausse des dépenses, injectées essentiellement dans la prise en charge de la revalorisation annuelle des pensions et la prise en charge financière des nouveaux inscrits sur les listings de la CNR. A cela s’ajoute le chômage, le report des cotisations sociales dues aux conséquences de la pandémie sur les entreprises et la migration de certaines activités vers l’informel, quand il ne s’agit pas purement et simplement de défaillances. Mais il ne faut pas se leurrer, le gros problème de la CNR est la faiblesse des cotisants par rapport au nombre de retraités. Il est question, selon les responsables de cette dernière, de 2,2 cotisants pour un retraité, alors que le niveau d’équilibre est de 5 cotisants pour un retraité. Et là, il y a lieu de rappeler que le gros souci réside dans la proportion qu’a prise l’informel et le nombre élevé de salariés non déclarés.

La fiscalité pétrolière pour combler le déficit en 2022

Comme pour chaque exercice, les déficits de la CNR sont comblés par le trésor public. Selon une déclaration du directeur général de la CNR, et pour payer les retraites à leurs ayant-droit, son organisme doit faire appel à deux sources principales que sont la Caisse nationale de sécurité sociale (CNAS), laquelle, précise-t-il, contribue par un apport financier de 80%, soit 50% des besoins de la caisse, auquel s’ajoute un complément versé par l’Etat, d’environ 18 à 20%.  Toujours selon le premier responsable de la CNR, la troisième source de financement dont dispose encore la caisse nationale des retraites est constituée par une part de la fiscalité douanière prélevée par les Douanes nationales au titre de la loi de Finances de 2018. Celle-ci aura contribué à hauteur de 50 milliards de dinars en 2019, et pratiquement le double en 2020. Mais voilà, les recettes fiscales se sont amenuisées cette année, et le fonds de régulation n’est plus. Pour parer, encore une fois, aux urgences et éviter la faillite de la CNR, le gouvernement Benabderrahmane a introduit, dans le projet de loi de finances 2022, une disposition qui permettrait à la CNR de bénéficier de 3% des recettes fiscales des hydrocarbures. Cela reste, toutefois insuffisant puisque cette contribution rapportera un apport prévisionnel de 63,92 milliards de dinars. On est loin des 690 milliards de dinars de déficit qu’enregistrera la CNR à la fin de l’année 2021.

B. A.

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