Mourad Preure : «J’ai plus confiance aujourd’hui en l’avenir de Sonatrach»

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Mourad Preure : «J'ai plus confiance aujourd'hui en l'avenir de Sonatrach»

L’Algérie doit se redéployer géopolitiquement par rapport à ses intérêts énergétiques et préserver la place de la compagnie nationale d’hydrocarbures Sonatrach dans le nouvel échiquier mondial. Un rôle que doit jouer le nouveau top management du groupe public, récemment installé.

PAR NABIL MANSOURI

Un changement au sujet duquel l’expert et consultant international en énergie Mourad Preure a exprimé sa vive satisfaction hier, lors de son passage à la radio nationale. « J’ai beaucoup plus confiance aujourd’hui en l’avenir de Sonatrach qu’auparavant », a-t-il déclaré, après avoir félicité le nouveau PDG du groupe public, Rachid Hachichi, le qualifiant de « pétrolier » et d' »enfant de Sonatrach ».

Pour l’expert, l’Algérie doit aujourd’hui réussir sa transition énergétique et numérique. « Il faut que l’Algérie soit un leader dans cette transition et entre dans la quatrième révolution industrielle avec le Big Data, la 5G, le cloud computer, qui consomment beaucoup d’énergie », a indiqué Preure, en assurant que cela n’est possible que grâce à l’intelligence et au patriotisme des Algériens.

«L’Europe vit une situation de désespoir»

Evoquant l’approvisionnement de l’Europe en gaz, l’expert en questions énergétiques a mis en avant la situation difficile que vivent actuellement les pays du vieux continent. « L’Europe vit une situation de désespoir », a-t-il dit, expliquant que ce continent est en train de subir une inflation exogène du fait de la hausse des prix, ce qui l’oblige à chercher des sources accessibles.

Selon Preure, le gaz n’est plus considéré comme une énergie de transition vers un paradigme non carboné et non fossile, mais bien une énergie de destination. « L’on s’oriente alors vers une géopolitique gazière qui tend vers le modèle pétrolier », a-t-il assuré, tout en mettant l’accent sur l’importance des distances entre les zones de production et les marchés.

Le gaz, selon lui, va renforcer sa position dans le bilan énergétique mondial, du fait qu’il représente 21% de la consommation énergétique mondiale, ce qui constitue, en rajoutant le pétrole (34%), un total de 55%. En 2021, le monde a connu un choc gazier qui est toujours en cours, selon l’expert, qui explique que les pays consommateurs, notamment européens, réclament des contrats à long terme pour assurer leurs approvisionnements gaziers, alors qu’auparavant, ils imposaient aux pays fournisseurs des ventes spots et supporter tous risques par rapport au marché et au volume.

Assurant que la guerre en Ukraine a fait perdre à l’Europe une quantité de gaz fournie par la Russie de 160 milliards de mètres cubes, Preure a souligné que ces pays chercheraient à s’approvisionner de n’importe quelle source, y compris des réserves de la Méditerranée orientale, malgré sa faiblesse. « Il faut savoir que dans cette zone, la Turquie est en train de s’imposer comme un hub gazier », a-t-il dit.

L’Algérie peut jouer sa carte de proximité

Sur ce point, Preure n’a pas hésité de mettre en avant l’avantage de la proximité de l’Algérie pour ses clients européens. « L’Afrique aussi est une zone stratégique, notamment avec l’Algérie et sa route du sud », a-t-il fait rappeler, soulignant que le facteur temps est très important dans l’approvisionnement du gaz.

A ce propos, il explique que pour construire des usines de regazéification pour accueillir du GNL en provenance du Qatar ou des Etats-Unis, il faudrait trois à quatre années pour avoir une situation de fluidité, alors que les Européens n’ont pas tout ce temps-là. « Sachant que certains pays, comme l’Allemagne, sont en situation inflationniste et de panique », a-t-il ajouté.

En plus, la guerre à Ghaza, a-t-il poursuivi, a surpris ces pays d’Europe, alors qu’ils sont dans cette situation complexe, avec une probabilité de durcissement de sources d’approvisionnement qatarie ou iranienne, qui constituent les grandes réserves de la région.

N. M.