Pièce de rechange automobile : Indisponibilité, flambée des prix et spéculation

0
190

/Le marché de la pièce de rechange connaît depuis le mois d’octobre dernier une nouvelle perturbation due au changement des codes des registres de commerce. Les automobilistes se sont retrouvés, graduellement, avec des manques sur certaines pièces et des hausses de prix sur d’autres.

Une virée du côté de certains revendeurs de pièces de rechange de l’Algérois nous met face à des situations diverses. Pour les uns, les hausses enregistrées sont celles appliquées chaque début d’année par le fournisseur et restent minimes (1 à 2%), pour les autres, c’est la baisse de la valeur du dinar algérien par rapport aux devises étrangères, conjuguée à la hausse du fret qui en sont la raison. Mais des revendeurs n’hésitent pas à pointer du doigt les grossistes qui n’hésitent pas à stocker certaines pièces pour créer la pénurie et faire flamber les prix sur le marché du détail.  Certaines pièces n’ont pas connu de changement de prix, ou de très légères hausses, d’autres ont carrément flambé. Et cela varie d’une marque à une autre. Mais les plus impactées par l’augmentation des prix restent les pièces de rechange des véhicules asiatiques, chinoises furent-elles, coréennes ou japonaises. Là, les raisons sont directement liées à l’augmentation des prix des matières premières sur certains produits, mais surtout l’augmentation des frais de transport. L’on apprendra, ainsi, qu’un conteneur de 40 pieds en provenance de Chine a vu son prix passer de 4500 dollars américains à 16.000 dollars, voir 22.000 dollars à certaines périodes.

L’assainissement des registres du commerce a eu du bon et du moins bon

L’initiative des pouvoirs publics, mise en place en automne dernier pour épurer le secteur des importations, a donné un coup de frein à l’importation des pièces de rechange. Les importateurs devaient se résoudre à avoir un registre du commerce pour chaque activité et disposer d’un certificat d’excellence pour justifier de la qualité de leurs produits. Certains opérateurs n’ont toujours pas pu reprendre leurs activités en raison de certaines lourdeurs bureaucratiques, alors que d’autres ont carrément abandonné la pièce de rechange, pour ne pas dire qu’ils ont disparu. Les véritables acteurs du secteur se sont félicités de l’initiative, mais regrettent que la régularisation de leur situation prenne autant de temps. Cela a permis de révéler au grand jour 6000 faux importateurs, ou importateurs fictifs.

Entre temps, ceux qui ont vu la pénurie pointer à l’horizon ont pris leurs dispositions pour emmagasiner des stocks et les remettre sur le marché selon leur convenance. C’est là où la hausse vertigineuse des prix de certains produits trouve sa source.

De plus, l’exécution des nouvelles dispositions est intervenue à une période où la pandémie de Covid-19 avait déjà impacté les prix des produits importés à travers une hausse des prix appliqués pour le fret et la dévaluation du dinar algérien. La suspension des importations de pièces de rechange en octobre dernier n’a pas manqué

Aïn M’lila et Tadjenanet, l’éldorado de la pièce de rechange

Le marché de la pièce de rechange, tous secteurs et tous segments confondus, avoisine les 3,5 milliards de dollars par an. La part consacrée à l’automobile (véhicules touristiques, utilitaires, camions, bus et motocycles) est estimée à 1 milliard de dollars américains. Ces chiffres remontent à la période pré-pandémie Covid-19, faut-il préciser. Dans ce milliard de dollars, le formel représente 20% et l’informel 80%. Il est utile de préciser que par formel, on vise les importateurs qui exercent en tant que concessionnaires ou représentants officiels de certaines marques. Leurs activités sont traçables à travers des facturations claires puisqu’ils disposent de réseaux de distribution propres ou partagés. L’informel est tout ce qui est distribué dans l’opacité parfaite. Et là, le cœur de cette activité se trouve à Aïn M’lila et Tadjenanet. Cet eldorado de la pièce de rechange s’est élargi pour proposer, même, des pièces d’origine, profitant du vide laissé par les concessionnaires automobiles qui ne pouvaient plus importer, depuis près de 3 ans, faute d’agrément.  

Quels types de pièces de rechange trouve-t-on sur le marché ?

De la pièce de rechange, on peut en trouver à différents prix. Ceux-ci peuvent aller du simple au double. Mais pour comprendre le pourquoi de cette différence de prix, il faut connaître la nomenclature des pièces de rechange. On trouve, ainsi, 4 types de pièces de rechange : les pièces d’origine, les pièces de première monte, les pièces adaptables et les pièces contrefaites. La plus chère de toutes est la pièce d’origine. Vient ensuite la pièce de 1re monte qui est de 15 à 20% moins chère. La pièce adaptable est de 30 à 40% moins chère que la pièce d’origine. Au-delà, c’est de la pièce contrefaite.

– Les pièces d’origine : elles ne sont pas fabriquées par le constructeur automobile, mais par des équipementiers spécialisés et sont utilisées dans l’assemblage des véhicules dans les usines. Emballées dans des boites portant le sigle du constructeur (automobile) et du fournisseur, elles sont homologuées et certifiées par ces derniers et offrent une garantie dans leur usage.

– Les pièces de première monte : ce sont les mêmes pièces que celles d’origine, et proviennent du même équipementier, sauf que leur emballage est différent. Elles ne sont garanties que par l’équipementier qui les fabrique.

– Les pièces adaptables : ce sont des pièces qui sont fabriquées par des équipementiers autres que ceux qui les fournissent au constructeur automobile pour la première monte, mais offrent des qualités d’usage similaires. Elles répondent aux normes imposées par le constructeur.

– Pièces de rechange contrefaites : même si aucun chiffre ne situe avec précision la dimension que prend la contrefaçon dans le marché de la pièce de rechange, celle-ci est estimée par les spécialistes à près de 50% du marché de la pièce de rechange. Cela veut dire qu’une pièce de rechange sur deux est contrefaite. Le plus souvent à l’insu du consommateur, pour la simple raison que la contrefaçon gagne de plus en plus en qualité… d’imitation. Que ce soit pour l’emballage ou pour le label. Il devient de plus en plus difficile de discerner entre une pièce de rechange d’origine, de première monte ou adaptable et une pièce de rechange contrefaite. Il est, donc, plus facile de se faire arnaquer vu les similitudes entre les pièces d’origine et leurs reproductions presque parfaites, d’où la nécessité de laisser cette besogne aux professionnels du domaine. Une pièce de rechange contrefaite est une pièce qui se présente sous la même forme que l’originale, sauf qu’elle n’offre pas les mêmes rendements ni la même fiabilité vu que les processus de production ne sont pas les mêmes. D’où le risque que cela représente pour l’usager dans l’utilisation quotidienne de son véhicule, surtout lorsqu’il s’agit de plaquettes de frein, de servofrein, de câblage, de suspension ou autres pièces mécaniques dont le mauvais rendement peut même engendrer des dégâts au moteur.

Même les revendeurs ont compris le système et s’arrangent pour que les prix ne soient pas trop en deçà de la moyenne pour ne pas éveiller les soupçons. Ces pièces proviennent essentiellement de Chine, plateforme mondiale de la contrefaçon, et à un degré moindre de Turquie.

Devant cet état de fait, la seule façon de réduire les risques de tomber sur des pièces contrefaites sont de s’adresser à un revendeur de pièces détachées qu’on connaît, ou à défaut d’exiger une facture ou un reçu d’achat. Cela permet de réclamer ses droits lorsqu’on se fait avoir. Mais l’idéal serait de laisser le garagiste ou réparateur chez qui on emmène sa voiture s’occuper de tout.

B. A.