Soirée en hommage à Hadj El-Anka à Tizi-Ouzou

0
131

PAR DELLOULA MORSLI

La maison de la culture Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou organise, le 19 mars, un spectacle de musique chaâbi en hommage au pionnier du genre, hadj M’hamed El-Anka. La soirée sera animée par de grands noms de la scène chaâbi, à savoir Mehdi Tamache, Madjid Belmouhoub, Rachid Bellik, El-Hadi ElAnka et Abdelkader Cherchame.

El-Anka, l’héritier et le maître

Maître fondateur du chaâbi algérien, hadj M’hamed El-Anka, de son vrai nom Mohamed Idir Aït Ouarab, est né le 20 mai 1907 à la Casbah d’Alger.

C’est à l’âge de 13 ans que le jeune M’hamed rencontre Mustapha Nador, un maître musicien qui jouait au café de la gare. Cette rencontre a marqué le début d’un long et riche parcours musical pour El-Anka. Sous la tutelle de Nador, le « cardinal » a d’abord appris à jouer du tar (tambourin) avant de s’initier à la mandoline. Il a également étudié le répertoire du chant religieux (hadra) et s’est familiarisé avec la tradition du m’dih. Après la mort de Nador en 1926, El-Anka a pris la tête de son orchestre et lui succède dans l’animation des fêtes. Doté d’un sens du rythme exceptionnel et d’une mémoire infaillible, il a consacré son talent à la rénovation de la tradition du m’dih et s’est inspiré de l’héritage andalou pour créer un nouveau genre musical: le chaâbi.

Créateur du genre et de son instrument

Hadj M’hamed El-Anka ne se contentait pas de suivre les traditions musicales. En
s’aventurant dans le chaâbi, il a exprimé sa volonté de se démarquer des orchestres de
musique andalouse. Il a introduit de nouveaux instruments comme le banjo et le piano, et a même conçu son propre instrument. Cet instrument, selon Kamel Ferdjallah, professeur de musique et élève d’El-Anka, était une extension de la voix du maître. La mandole est donc bel et bien de chez nous. Instrument ancien, aux origines médiévales, sa forme actuelle à caisse aplatie doit sa conception à hadj El-Anka et à la réalisation du luthier italien Bellido. La création de la mandole, le « cardinal » l’avait évoquée dans un entretien avec l’écrivain Kateb Yacine, où il affirmait avoir « réalisé le plan de cet instrument en 1935, et l’avoir remis au luthier de Bab El-Oued, Jean Bellido », également professeur de musique.

Paternité et succession

Véritable pédagogue, hadj El-Anka a enseigné le chaâbi au conservatoire municipal d’Alger en 1957. Cette initiative a joué un rôle crucial dans la transmission et la pérennisation du genre. Son propre fils se réclame de cet héritage. Artiste complet, El-Hadi El-Anka chante le chaâbi tout en étant chef d’orchestre. Véritable génie dans la pratique des instruments de musique, il perpétue la tradition orchestrale introduite par son père. L’autre enfant du « cardinal », spirituel cette fois-ci, n’est autre que cheikh Abdelkader Cherchame. Ce dernier, natif de la Casbah comme son maître, rejoint en 1965 le conservatoire d’Alger toujours dirigé par M’hamed El-Anka, avant de devenir son assistant. Primé à maintes reprises depuis son jeune âge, Cherchame a lui aussi contribué à faire vivre l’héritage du « cardinal » en formant, à son tour, plusieurs artistes devenus des célébrités du chaâbi.

Les deux héritiers d’el-hadj seront présents à la salle des spectacles de la maison de la culture de Tizi Ouzou mardi prochain, aux côtés d’autres grands noms du chaâbi, afin d’honorer sa mémoire.

D. M