Taïri, président de l’Union nationale des ordres d’avocats : «On est prêt à jeter nos robes pour défendre nos droits»

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/Au lendemain de la décision de l’assemblée générale des avocats de boycotter à nouveau les activités judicaires, Brahim Taïri, le président de l’Union nationale des ordres d’avocats, revient sur les raisons de passer à la vitesse supérieure du mouvement de protestation contre le système fiscal imposé aux avocats par la loi de fiances de 2020 et répond au SG du SNM qui juge leur revendications corporatistes.

Les ordres d’avocats à l’échelle nationale ont tenu une AG jeudi dernier, pourquoi ? Quelles sont les résolutions qui ont été prises ?

Les avocats ont, en effet, décidé de  boycotter les activités judicaires liées aux affaires criminelles et aux mineures, et aussi de ne plus payer l’impôt prévu par le loi de finances de 2020, car nous avons déjà conclu un accord avec la Direction générale des impôts portant sur une prolongation pour que l’avocat ne paie pas le G50. Mais, il n’y a eu depuis aucune suite. Pire, on nous invite à payer les impôts comme s’il n’y avait eu aucun accord, alors que cela a été décidé sous la supervision du Premier ministre. Depuis 6 mois, la DGI n’a cessé de reporter la mise en œuvre de la décision, semaine après semaine et on n’arrive même pas à se réunir avec eux. C’est sur cette base que nous avons pris cette décision, parce que  l’avocat tient à sa parole et ne reviendra pas sur sa décision.  

Envisagez-vous de reprendre le dialogue pour le règlement de la question ?  

Assurément, pour nous, le dialogue reste ouvert, mais c’est avec la directrice de la DGI qu’il est rompu. On est disposés à nous entretenir et collaborer avec le ministre des Finances. Nous avons demandé également l’intervention du président de la République parce que par rapport aux commerçants qui paient 5% de leur chiffre d’affaires, on nous demande de payer 54% et de payer la TVA. Mais, l’avocat ne demande pas au citoyen de payer la TVA. Où est l’équité en impôts comme le prévoit l’article 82 de la constitution algérienne qui stipule que «les citoyens sont égaux devant l’impôt».

Quelles sont les conséquences de votre  décision de boycott des activités judicaires ?

La responsabilité incombe à celui qui joue avec les deniers publics, parce qu’il s’agit d’argent du Trésor public. C’est sérieux de notre part. Nous avons élaboré une étude que si on appliquait notre proposition de retenue à la source, le trésor public va bénéficier de 500 milliards de centimes additionnels. Et cela peut même atteindre les 1000 milliards de centimes.

L’une des réactions enregistrée suite à votre protestation, émane du SG du syndicat des magistrats, Issaâd Mabrouk, qui juge vos revendications « corporatistes »  et «arrogantes».

Cette action ne concerne nullement le président de ce syndicat, et la justice est la propriété du peuple algérien, non pas d’une seule personne quand bien même elle représente les magistrats. Et si les juges veulent enrôler cette affaire qu’ils le fassent, parce qu’il s’agit pour nous d’une affaire de principe. Et si on considère que l’avocat qui doit défendre les droits des citoyens est lui-même victime d’injustice, on est disposés tous comme on est à jeter nos robes, à  les déposer devant les cours de justice et rentrer chez nous. On est prêts à arrêter ce travail et à vie si on ne pouvait pas nous défendre par nous-mêmes. De plus, cet impôt contre lequel nous militons, c’est le citoyen qui le paye. Et si augmentation de la TVA il y aura, ce sera répercuté sur le citoyen. Autrement dit, l’avocat ne défend pas uniquement son droit  personnel, mais aussi celui du justiciable. L’avocat n’abandonnera jamais le citoyen et continuera à le défendre quoi qu’il lui en coûte.  

Jusqu’à quand allez-vous poursuivre votre mouvement ?   

Ce que l’on demande est qu’on revienne à cet accord. Pourquoi y a-t-il eu un recul à ce sujet ? Qu’ils nous donnent des explications. Et s’il n’y a pas eu de recul, qu’ils nous le disent clairement. On doit discuter et tenter d’arriver à une entente. Mais, qu’on fasse comme si de rien n’était, cela on ne peut pas l’accepter.

  1. R.